Mataŋi – mon prao amphidrome

Discussions sur la construction de voiliers légers et de dériveurs

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Uminchuu
Mousse
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Mataŋi – mon prao amphidrome

Message non lu par Uminchuu »

Il y a deux ans, je suis tombé sur ce forum à la recherche d'inspiration et d'aide pour construire une pirogue à balancier et quelques semaines plus tard, un camion sans essuies-glaces est venu me ramener Corisco, la pirogue monodrome que To m'avait offerte.

Toit en me faisant la main sur cette attachante embarcation, j'ai poursuivi ma découverte du monde des pirogues océaniennes. Imaginez, la moitié bleue du monde où des praos ont permis la colonisation de myriades d'atolls et d'îles hautes! Et je ne parle même pas de toutes les connaissances qui vont avec, notamment en navigation.

J'ai ensuite trouvé une petite annonce pour une pirogue amphidrome près du Lac de Constance, en Allemagne. Le vendeur avait acheté une coque à Vienne, en Autriche, à la fin des années 1990 et poursuivi la construction du prao jusqu'en 2001. À peine l'eût-il terminé qu'il partit pour l'Irlande. D'abord posé sur l'ancienne rampe de lancement des hydravions Dornier, le bateau, appelé Makani (vent en hawaïen) avait dormi 20 ans entre une grange et un enclos à chevaux. Grâce à un transporteur trouvé sur internet, qui se trouvait être capitaine de tjalk frison en mer du Nord (une de mes régions d'origine), je l'ai ramené et retapé.
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Le constructeur, Max, est un ingénieur hydraulicien allemand qui conçoit aujourd'hui encore des praos sur des logiciels 3D pour se changer les idées. Il m'a aidé à m'expliquer Mataŋi (vent en proto-polynésien, j'aime bien les langues et puis les polynésiens de l'est n'avaient plus d'amphidromes): l'accastillage, le shunt, le gréement.



La coque principale (va'a) est faite de solidissime contreplaqué de 6mm pour 6m de long. Le balancier (ama) fait 4.8 m. Une paire de iatos en laminé/collé réunit le trampoline au vent ainsi qu'un petit trampoline sous le vent. Je les trouve superbes, mais lourds et trop bas. Le prao se dirigeant sans gouvernail, en déplaçant le poids de l'équipage, ils ont tendance à freiner le tout.

La voile est en pince de crabe. Il s'agit d'un Delta dont j'ai entaillé le bord de chute pour avancer le centre d'efforts et éviter qu'il soit trop ardent. La bâche vient d'un brico-marché et m'a coûté 20.–. Du scotch extrasolide fait l'affaire. Le chantier naval PJOA de Gdansk fait des voiles spéciales mais c'est 400.– et à ce prix-là, je peux me faire une bonne pétée de voiles pas chères). Ce gréement est 1.8× plus efficace qu'un gréement Marconi.

Une vieille rame d'aviron peut être calée sur chaque iato, mais je ne l'utilise pas tant; juste pour propulser le prao à la rame (c'est une pirogue, quand même).

Pour virer de bord, on shunte: on relâche l'écoute, puis on tire une corde qui passe entre deux poulies et à laquelle le point d'amure est noué, de sorte à le ramener vers l'autre bout. Le bateau part dans l'autre sens et conserve l'ama au vent. Ce dernier le soulève et laisse le va'a fin comme un couteau fendre les flots avec sa véritable aile delta sur le pont.
Ce qui me frappe, c'est la facilité avec laquelle la voile capte le moindre vent. L'allure est celle d'un Hobie 16, mais les catas plus grands vont plus vite. Mais avec 1-2kn de vent, on avance, on avance même bien, quand tous les autres voiliers restent tankés sur place.

Par contre, c'est pas vraiment fait pour naviguer seul: la mise à l'eau avec 120kg et une embarcation asymétrique n'est pas chose aisée et le tout est quand même trop lourd pour être propulsé à une seule pagaie (à deux pagaies, par contre, ça fuse).
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Cela dit, les eaux du lac de Neuchâtel sont turquoises quand elles ne sont pas carrément cristallines et un prao là-dessus, c'est le dépaysement assuré.
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C'est aussi un voilier pas cher: le mât en carbone provient d'une benne, la voile est une bâche de jardin et sa surface de 12m² correspond à 21m² de grément Marconi, tout en étant sans permis, ici.
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Re: Mataŋi – mon prao amphidrome

Message non lu par to »

:smt007
Très classe !

Effectivement les iatos sont trop bas au niveau de la coque, ils doivent toucher l'eau et t'éclabousser à chaque vague. J'avais fait l'erreur inverse sur Corisco, avec l'attache trop basse sur le flotteur. Dès qu'il s'enfonçait trop, ça donnait un grand coup de frein.

Quelle forme a la coque ? Fond plat très étroit et 2 bordés ? Quelle largeur à la flottaison ?

Comment trouves-tu la navigation avec le gréement amphidrome ? Facilité de suivre un cap sans gouvernail, de shunter, vitesse max atteinte, ... j'ai beaucoup de questions !
Avec quelle force de vent as-tu navigué ? Quelle stratégie pour réduire la voilure ?

6m, c'est pas mal comme longueur, pas trop encombrant encore. Ça doit être solidement construit pour peser déjà 120kg, Corisco et ses 4.80m doit peser dans les 50kg de mémoire. Il faudrait un bon chariot de misalo pour faciliter les choses, mais ça reste le travail de 2 personnes.
:smt006
Je suis un acrobate masochiste ordinaire.
Accessoirement président de l'asso, modo, webmaster.
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