Pour une fois que je maitrise un sujet, je me crois autorisé à apporter mon grain de sel.
Je connais bien le sujet du contreplaqué marine car il fut un temps avec l'architecte François Vivier, les fabricants SEDEB (Déroulage) et La Boisserolle (collage et finitions) nous avions tenté de convaincre l'ADEME de créer un contreplaqué marine en Douglas Européen, essence qui présente des qualités supérieures à l'Okoumé pour la construction navale , en particulier par sa résistance et sa durabilité, ce que les indiens d'Amérique avaient deviné depuis longtemps pour leur canoë.
Les américains ont longtemps construit leur bateau en Douglas mais le produit n'a pas pu résister à la concurrence de l'Okoumé.
Rien ne distingue un contreplaqué marine d'un contreplaqué extérieur si ce n'est l'épaisseur des plis. En effet plus il y a de plis pour une épaisseur donnée, plus c'est costaud. Un vrai contreplaqué nécessaire à la structure d'un bateau propose des plis d'environ 1,2 mm, ce qui est tout à fait remarquable, soit 7 plis pour du 9mm (et non 5), ou 9 plis pour du 12 mm (et non 7). C'est le nombre des plis qui fait la différence et non la colle, des plis très fins, mais sans trous (comme chez les chinois) , sans noeuds et qui superposés les uns aux autres dans le sens contraire des fils donne un produit très performant.
Mais la réglementation ne prend en compte que les colles qui doivent être résistantes à l'eau pour mériter la qualification marine, et c'est tout, d'ou la jungle des étiquettes où on n'y comprend plus rien
Disons que les entreprises françaises (Joubert, La Boisserolle) respectent les normes européennes et maitrisent très bien la fabrication d'un contreplaqué à plis fins. Il n'y a donc aucun risque à acheter chez eux (ne pas confondre le fabricant et le distributeur : Charles, Bois de Saint Malo, Toubois etc..)
Le contreplaqué est un produit industriel qui nécessite des investissements très lourds
tant pour le déroulage que pour le collage.
Voir par exemple la vidéo sur le site du fabricant Drouin
https://www.drouin.fr/activites/
Un tel produit ne peut donc s'amortir que sur de gros volumes de production, et la demande en contreplaqué vient essentiellement du bâtiment et non de l'industrie navale.
Cela impose d'utiliser des essences adaptées, soit des bois tendres, le peuplier européen d'une part, l'Okoumé des tropiques d'autre part, l'un et l'autre très propice au déroulage et qui ont à la fois l'avantage et l'inconvénient d'être très léger, c'est à dire peu dense.
Si nous avons échoué dans notre projet de contreplaqué en Douglas, c'est que pour arriver à un pli très fin avec cette essence, il faut l'étuver, (le chauffer) car il est moins tendre, plus fissible et plus noueux que le peuplier ou l'okoumé et présente en conséquence un risque de pertes bien plus important pour l'industriel, d'autant que la demande ne sera pas vraiment au rendez-vous puisque son prix de revient sera forcément supérieur.
Le peuplier européen et l'okoumé gabonnais sont des cultivars issus de plantations renouvelables PEFC mais malheureusement la contrebande issue du pillage de la forêt primaire (au Niger par exemple) vient totalement fausser le jeu sur le marché international pour le plus grand bonheur de la chine. Cette contrebande est en effet estimée à environ 45% du volume du marché. C'est énorme !
Mais je reste persuadé que le contreplaqué reste un produit très adapté à la construction navale, surtout à l'unité, recyclable à 90%, avec un rapport poids/performance très compétitif. Notez donc qu'un contreplaqué de 9 mm à 7 plis en peuplier risque d'être plus performant et plus durable qu'un contreplaqué de 9 mm à 5 plis, en pin par exemple. Le meilleurs compromis reste néanmoins l'Okoumé. Bien sûr, c'est plus cher mais on n'a rien sans rien. Acheter Français en cette matière (Joubert a des usines au Gabon), cela signifie acheter un produit de qualité respectueux des normes de fabrication et des plantations réglementées. Notre filière bois est très performante d'un point de vue industriel et je voulais vous le dire, sans chauvinisme mais objectivement, après étude.