Dans les sixties, j'ai travaillé dans un chantier qui construisait des canoës "canadien" .
Les plans étaient achetés chez Dervin.
L'accastillage et les fournitures (pointes, rivures, bandes molles dures, etc...) étaient achetés chez Metayer ou chez Bonnet (La Flotte Française). C'était les shipchandlers de référence de l'époque. Le Manufrance des bateaux.
La méthode construction était assez simple mais reposait beaucoup sur l'adresse et le savoir faire des compagnons qui étaient autant ébénistes que charpentiers.
Sur un moule constitué de demi gabarits assemblés sur une planche centrale, on commençait par poser les étraves puis on bordait avec des fixations provisoires (pointes sans têtes). Les bordés, en acajou de 8 à 10mm, étaient assemblés à mi-bois. Ils étaient profilés à la toupie sur un gabarit résultant de quelques années de tâtonnement. Pour l'assemblage final, ils étaient rectifiés au rabot et au guillaume.
Le bordage se terminait souvent par un carreau en frêne ou en orme.
Puis venait la pose des membrures. Il y avait deux écoles : minces plates et larges ou demi rondes assez épaisses.
Je n'ai connu que les demi rondes. Elles étaient en frêne de 12 à 15mm de largeur. Cintrées à la vapeur, elles courraient d'un plat bord à l'autre.
Le compagnon surveillait l'étuve, plaçait la membrure et la maintenait avec des serre joints. Il perçait les trous de rivets avec une chignole à main. L'apprenti (le gamin, c'était moi) assis par terre sous le bateau, enfilait le rivet et s'installait pour porter le coup. Le compagnon coupait le rivet, le pliait en deux coups de pince et le rabattait.
Cela durait deux ou trois jours. Un rivet par lame et par membrure soit entre 1000 et 1500 rivets par bateau.
Puis venaient les finitions : listons, banquettes, contre-étraves, pontages, etc...
Tout était possible en fonction du budget et de l'orgueil des compagnons :
- mélanges d'essences de bois
- cannages des banquettes
- chantournement et moulurages divers.
Pour la finition on utilisait des vernis hollandais, des brosses suspendues dans l'huile de lin et beaucoup de papier abrasif de grain 600 et plus.
A l'époque, un canoë coûtait l'équivalent d'un ou deux mois de smic !
Le red cedar se taille au cutter.
Les ajustages peuvent être approximatifs.
Le tissu et la résine assurent étanchéité et solidité.
Alors pourquoi s'embêter à chercher autre chose ?